SOI contre la société

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SOI contre la société

La niaiserie ambiante, fruit d’une ignorance abyssale, et d’une éducation empêchant toute prise de recul, laisse accroire à chacun d’entre nous que… être soi, c’est s’affirmer CONTRE les conventions sociales (contre la norme). Qu’il suffit de s’affirmer contre pour être unique, différent, authentique, quelqu’un.

Etre soi, ce serait dire ce qu’on pense, faire comme on veut, se moquer du qu’en dira-t-on, être dérangeant.

Comme la plupart d’entre nous n’a aucun recul sur son formatage social, sur ce qui le conduit à s’affirmer d’une façon et pas d’une autre, on voit rarement que s’affirmer contre, affirmer son “soi” est très codifié.

C’est en réalité très conventionnel de s’affirmer contre les conventions…
On utilise le même code, tous, pour s’habiller “contre”, se montrer “contre”, parler “contre”, de soit-disantes conventions. Ce sera les mêmes postures, les mêmes phrases faciles, qu’on pique à d’autres, sans se rendre compte que cela annule de facto ce sentiment (ce “fait”) d’unicité qu’on veut transmettre, montrer, imposer aux autres, par ces mêmes phrases

N’est-ce pas amusant de se dire que des (centaines de) millions de gens adoptent un code identique pour s’affirmer contre les codes sociaux? Puisant dans le même fond rhétorique…
De plus, sur facebook, lieu où le code règne… Dites adieu à votre compte facebook si vous ne respectez pas le code prévu pour l’affirmation de votre identité si rebelle 🙂

N’est-ce pas amusant de se dire que notre identité si individuelle, si UNIQUE, est démontrée, projetée dans l’espace public, avec des outils non individuels, uniques, mais absolument communs?

Rien de plus convenu que d’être et s’affirmer contre les conventions.

En réalité, dès qu’il s’agit d’image sociale, nous utilisons toujours un code,établi par d’autres et suivi à la lettre, que ce soit pour s’affirmer POUR ou s’affirmer CONTRE, en fonction des circonstances.

On le fait car :
– on utilise ce qui nous a formaté, les outils à notre disposition. Le fonds de phrases et de postures fournies par la culture. On n’a guère le choix. Si le fait de s’affirmer Soi “contre” n’est pas dans le logiciel social, bah on n’aura même pas l’idée de le faire.- on veut être COMPRIS ! Et c’est le plus drôle ! Car à quoi bon s’affirmer et vouloir qu’on nous voit comme à la fois différent et supérieur aux autres tant on est rebelle, si l’on n’utilise pas un langage commun, un langage que les autres puissent comprendre? Si on n’est pas compris, on va passer pour fou, et ce sera donc contre-productif. Car si on se décrit de manière conventionnelle comme fou, c’est pour affirmer son identité, pour faire genre, pas pour être vraiment pris pour un fou 🙂

Le “Moi Je” est produit à la chaîne.

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