Réponse donnée dans le cadre d’un mémoire de fin d’études.
Bonjour Mr. Lafay,
Je me permets de vous écrire ce mail car je rédige actuellement mon Mémoire de fin d’études dont j’ai axé le travail sur l’étude de “la musculation avec poids du corps” et son évolution dans l’histoire et la société. Aussi, il est tout naturel que j’y ai consacré un chapitre à votre formidable Méthode que je pratique occasionnellement. De ce fait, j’aurai aimé connaître les raisons de son élaboration, et ce qui vous y a conduit, comment, par quels procédés ? (En dehors de ce qui est déjà expliqué dans votre ouvrage). De plus, je me posais la question de savoir ce que vous pensiez de la Méthode Naturelle de G. Hébert qui fut un grand acteur dans le domaine de la musculation à son époque, tout comme vous aujourd’hui (le contexte social ayant changé, mais j’ai crû entendre que La Méthode Lafay faisait une entrée discrète dans le monde de l’Eps (je suis enseignant d’Eps remplaçant)). Aussi, je me demandais si la Méthode naturelle de G. Hébert avait inspiré vos travaux, bien que je sache parfaitement faire la différence entre les deux.
Je vous remercie du temps que vous pourriez consacrer pour m’aider. Aussi, je vous prie d’agréer à mes respects.
Ma Réponse :
Bonjour XXX,
Si vous voulez en savoir davantage sur l’élaboration de la Méthode, il faut lire l’introduction de Turbo (le volume 2), les articles rangés dans les rubriques Efficience et Ingenium de mon site (olivier-lafay.com) et mon interview sur le site all-musculation. Il y a là de quoi saisir à la fois la substance de la Méthode, ses références et l’histoire de son élaboration.
Une fois saisies les assises conceptuelles de la Méthode, et donc saisi que c’est la première (et la seule) tentative de produire un entraînement fondé sur des valeurs et savoirs autres que ceux qui fondent la musculation “traditionnelle”, autres donc que la pensée dualiste, “tout génétique”, “no Pain No Gain”, etc; vous comprendrez aisément ce qui différencie mon travail de celui de Georges Hébert.
La musculation au poids de corps n’est pas pour moi une idéologie; c’est avant tout une solution simple de compromis à la problématique de l’entraînement le plus efficient qui soit. Le poids de corps est donc “le meilleur outil compte tenu des contraintes établies lors de l’établissement du cahier des charges de cet entraînement efficient”.
Je n’ai pas une philosophie de l’entraînement au poids de corps, mais une philosophie de l’Efficience. Si mon projet d’entraînement alternatif viable avait exigé l’utilisation d’haltères, je l’aurais fait sans hésiter. Je n’ai pas une conception “religieuse” de l’entraînement au poids de corps.
Si mes propos sont pour vous clairs, alors la différence entre mon travail et celui de G. Hébert ne pourra que vous paraître une évidence.
Excepté le poids du corps, je n’ai guère en commun avec Hébert. Et je considère qu’il a, idéologiquement, beaucoup plus en commun avec le monde des haltères qu’avec moi. Si l’on veut passer à un niveau supérieur de raisonnement, d’analyse, alors il faut savoir comprendre que la distinction entre les entraînements n’est pas une question d’outil (haltères, ressorts, poids de corps, etc.), mais de méthode, et donc, à la réflexion, la distinction est avant tout épistémologique (au sens de Gregory Bateson).
Hébert a vécu et donc produit dans un contexte (idéologique et historique), se fondant sur une épistémologie qui n’a pas quitté le monde de la musculation (avec haltères, poids de corps etc), et que j’ai voulu renverser en élaborant la Méthode Lafay, dont les références sont une épistémologie autre (références dans mes articles).
Je n’ai, de plus, aucun fantasme produisant un idéal de retour à la nature, au jardin d’Eden, à un âge d’or (Hésiode), à une époque bénie des dieux où l’homme aurait été un “bon sauvage” (Rousseau) capable de produire naturellement (spontanément) les actions justes permettant de le maintenir en bonne santé physique et psychique.
L’utilisation du poids de corps n’est pas pour moi “anti-technologique”, immergée naïvement dans le mythe du “fonctionnel”… Au contraire ! L’utilisation du poids de corps est, dans le cadre de la Méthode Lafay, issue des progrès les plus avancés de la pensée technologique (cybernétique).
Pour aller plus loin, deux articles de base :
– (comprendre le contexte de G. Hébert et de toute la musculation “classique”) https://olivier-lafay.com/2014/01/06/la-methode-lafay-est-elle-un-sport/
– (texte fondateur) https://olivier-lafay.com/2012/02/15/de-lefficacite-a-lefficience-la-nouvelle-voie-du-muscle/
Ensuite, je vous invite à lire les autres articles, comme proposé au début de ce courrier.
A bientôt,
Olivier
Très enrichissant. J’apprend l’Efficience dans “le Monde des Haltères”. C’est une bonne conception de la musculation, comme de la vie en général. C’est une philosophie dépolluante, je dirais même hédonique dans sa discipline. Merci pour cette recherche intellectuelle dans ce monde de golgothe. Ca rajoute de la valeur aux choses, de la légitimité à la passion.
Amicalement