JE NE tolère PAS l’intolérance

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JE NE tolère PAS l’intolérance

(mais puis-je me tolérer alors?)

Je voudrais juste montrer l’attitude paradoxale qui consiste à juger qu’on ne doit pas juger.

Beaucoup de gens le font, surtout sur le net, car cela fait partie des phrases toutes faites à la mode, que l’on emploie sans jamais les penser.

Si c’est pas bien de juger, alors personne sur le net ne devrait intervenir pour juger ceux qui jugent. sinon, il y a une faute logique.

C’est exactement comme “arrêtons de se prendre la tête”. C’est un ordre donné à quelqu’un qui nous invite à réfléchir.
C’est encore une fois intervenir dans la vie de quelqu’un. C’est une… leçon de vie. On intime l’ordre à celui qui exprime un désaccord argumenté de se taire. Dans l’océan du faux amour internet, des humanismes/animalismes de façade, cherchant à nous imposer aux yeux des autres comme étant meilleurs que Jésus Christ lui-même, celui qui met le doigt sur des incohérences fait tâche. Alors le grand juge vient pour juger que c’est pas bien de juger. Il remet l’empêcheur de se branlotter en rond à sa place.

C’est une philosophie cheap : il suffit de trois mots pour dire à l’autre ce qu’est la vraie sagesse. “Sois sage comme moi, ne juge pas.”

Derrière tout ça, il y a :
– la volonté de sa valoriser en donnant des leçons publiques (donc se mettre au-dessus des gens);
– la volonté de le faire sans débattre, construire une pensée, aller au fond des choses. Au contraire, il s’agit de ne pas réfléchir.

La peur de débattre est pourtant anti-sociale.
La volonté de ne pas réfléchir empêche tout accord, toute compréhension réciproque, toute évolution des relations humaines.
C’est paradoxal de voir que, sur des réseaux dits sociaux, les gens ne veulent surtout pas être pleinement sociaux, mais juste se valoriser, et ce aux dépens des autres (mais sans le voir, le comprendre et en refusant qu’on mette le doigt sur cette attitude paradoxale).

On est quand même arrivé à faire croire à des millions de gens que penser c’est mal, être en désaccord c’est mal, débattre c’est mal.
Il ne faudrait pas chercher à progresser.
Ou du moins, le seul progrès acceptable serait celui d’un statu quo de consommateurs béats. Le silence de la pensée dans le bruit constant des petites joies mécaniques, et des CB qu’on débite.

Et ainsi on a des millions de gens sur le net qui n’ont plus qu’une leçon à la bouche : celle qui dit qu’il ne faut surtout pas donner de leçons.

Les philosophes, psychologues, sociologues, anthropologues, biologistes, archéologues, primatologues, etc. nous donnent tous des leçons. En nous invitant à creuser notre pensée, à nous donnant des éléments pour exprimer notre désaccord, ils nous permettent, par le débat, de faire progresser la pensée, et donc les actes, les relations. Et c’est là que se niche la véritable voie de l’amour…

Face à ces millions d’éléments de réflexion donnés par les sciences, ces millions de leçons, on a des millions de gens qui, eux, n’ont qu’UNE leçon à la bouche :
Soyons lisses. Ne pensons pas. Ne débattons pas. N’ayons aucun désaccord apparent. Et donnons LA leçon à tous ceux qui enfreignent cette loi.
Il n’existe plus alors qu’une leçon, oui, la leçon qui consiste à dire qu’il ne faut pas donner de leçons; et au nom de l’amour, bien entendu.
La non pensée au nom de l’amour…
Comme si on pouvait construire de l’amour sans culture, sans pensée, sans conflits, sans dépassement des conflits !

Les donneurs de la “leçon du statu quo” ne réalisent même pas qu’ils oeuvrent pour une uniformisation de la pensée, à un point tel que celle-ci ne peut plus que disparaître.
Comme si la non pensée allait sauver l’humanité. Comme si penser tous à partir de phrases toutes faites, et toujours les mêmes phrases, allait nous faire avancer, nous humaniser.
Peut-on s’humaniser en supprimant ce qui fait justement notre humanité?

Et derrière ce paradoxe qui consiste à donner LA leçon qui est de ne pas donner de leçons, il y a toujours ce besoin humain de se valoriser aux dépends d’autres humains.
Il y a ceux qui pensent, veulent penser, et qui sont des êtres inférieurs, qui n’ont pas compris ce que le “sauveur” vient expliquer, et qui tient en une phrase : ne pas juger (en construisant une argumentation). Ne pas penser, donc.
Le sauveur a compris, lui, et il peut prendre une position supérieure pour expliquer LA vérité. La doctrine de l’homme lisse, celui qui ne pense pas, comme tout le monde;
L’homme lisse, aux rugosités préfabriquées en usine, qui adopte des idéologies comme on a un passe-temps, et dont les colères, emportements, sont de façade, toujours prêt à s’incliner devant le grand consensus de la mollesse et de l’ignorance.

Finalement, au 21° siècle, le totalitarisme a changé de visage.
La censure, c’est le peuple qui la commet, et au nom de la liberté d’expression.

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