Le mythe des suppléments protéinés

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Le mythe des suppléments protéinés

Cela risque de faire grincer des dents, c’est certain.

Ce qui ressort de cette vidéo, peu développé mais bien présent, c’est l’aspect “religieux” de la prise de suppléments/compléments.
Il s’agit d’un rituel, qui s’apparente clairement à un acte de foi. J’ai écrit à de nombreuses reprises sur les liens entre croyance, mythe et supplémentation. Et dans le premier chapitre de Méthode de nutrition, je mets en évidence que l’alimentation est une construction socio-culturelle plus ou moins objective, plus ou moins rationnelle et analysée.

Dans le cas des suppléments, on remarque l’adoption bien souvent inconsciente de l’argument pascalien du “comme si” : on est tout d’abord happé par les sirènes de la publicité, les arguments d’autorité et les études scientifiques généreusement distribuées (et filtrées), et par la propagande fiévreuse de ceux qui sont déjà devenus des croyants.
Alors, on se lance une première fois en faisant “comme si” ça allait marcher. On a envie d’y croire, car la tâche de créer et entretenir du muscle peut sembler titanesque.

Puis, à force de “comme si”, on finit par croire que c’est vraiment indispensable. De plus, au bout de quelques temps, on a déjà dépensé tellement d’argent, on a peut-être été tellement naïf, qu’il vaut mieux y croire “pour de vrai” plutôt que de se retrouver, peut-être, face au douloureux sentiment de s’être trompé et de s’être fait avoir…

C’est là que la foi est à son apogée : quand l’utilisateur est persuadé que s’il arrête d’en prendre, non seulement il ne se développera plus, mais il régressera… Et, devenu un croyant fanatique (par peur de vérités qu’il soupçonne mais ne veut pas voir), il veut convertir les “infidèles” et est très susceptible quand ceux-ci critiquent ou moquent sa pratique d’absorption de “poudres magiques”. Comme tout religieux fanatique, il n’a aucun humour lorsqu’il s’agit de sa foi.

C’est là que le commerçant se frotte les mains : quand le client, totalement aliéné, devient un acheteur régulier et un prosélyte. Il n’est même plus besoin de le solliciter pour qu’il renouvelle tous les mois sa gamme de poudres ensorcelantes et ensorcelées, et il défendra la Foi contre toute atteinte venues de la part des “ignorants” qui questionnent cette addiction.

Loin de moi, cependant, l’idée de rejeter totalement l’utilisation de suppléments protéinés. Même s’il est bien souvent inutile d’en prendre, ils peuvent néanmoins s’avérer pratiques, lors d’une perte de graisse sur le long terme avec des baisses conséquentes de kcal, ou lorsque l’on doit s’absenter avec une difficulté à emporter une nourriture préparée (manque de place ou de moyens).

Les suppléments protéinés, lorsqu’ils sont utilisés rationnellement, peuvent être utiles. Bien plus utiles, au final, que les autres suppléments destinés aux pratiquants de musculation, portant généralement des noms ronflants, et dont le prix est quand même bien élevé pour des placebo.

Peut-être serait-il plus judicieux (et économique) d’exercer régulièrement la foi en soi-même, de construire sa foi et son recul critique en pleine conscience, plutôt que de laisser cette tache au “marché” avec les inévitables désillusions et frustrations (et perte de pouvoir d’achat) que cela engendre…

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4 réflexions au sujet de « Le mythe des suppléments protéinés »

  1. la video ne marche plus

  2. Il est possible de simplifier avantageusement la description du mécanisme d’un tel piège par l’application de la théorie mimétique sans passer par le rejet de commerçant qui seraient malhonnêtes avec intention de nuire ni par l’amalgame avec une “foi” ici bien peu religieuse avec extension aux intégrismes, mot qu’il ne faudrait utiliser qu’en connaissance de cause, s’agissant d’un phénomène bien particulier de révolte contre la folie occidentale.

    En effet, si le sujet désirant désire l’objet parce que le modèle désire l’objet, par mimétisme, il suffit de poser que les assuétudes remplacent le modèle par l’objet via la société de consommation qui emballe ses produits (objets de désirs) dans des packaging vendeurs (modèles désirant ad hoc). Autrement dit, plus on désire quelque chose, plus on la désire (bis repetita placent, dit le latin). Il manque à ce mécanisme la raison pour laquelle le sujet oublie la possibilité de se rétracter par la raison et la constatation que ces produits sont nocifs malgré la promotion qui en est faite, dans une société où il est de notoriété publique que toute publicité est suspecte et où le client dans une large mesure demande à voir. On peut mentir un petit peu sur un produit, et faire passer un gadget pour mieux que ce qu’il n’est mais si la publicité ne correspond nullement au produit, le produit est rejeté.

    A part ça, il est de multiples façons de vivre sa foi religieuse mais la plus répandue est aussi la plus discrète et une personne religieuse est souvent gentille et aimable, très peu encline à tomber dans les pièges mimétiques, le Christ étant le roi de la mise en garde contre le mimétisme comme le montre René Girard, fondateur de la théorie mimétique. Cet article paraît moins inspiré que d’autres mais je peux comprendre qu’Olivier Lafay, défenseur des méthodes saines, se mette en colère devant ceux qui détruisent son œuvre, par bêtise. Il serait d’ailleurs intéressant que l’auteur se penche sur le christianisme sommairement pour comprendre le rapport des chrétiens au corps, à la fois sensuel et d’une telle discrétion qu’elle a pu confiner au puritanisme névrogène du XIXe siècle bourgeois. L’adoration des supplices par l’église catholique romaine a souvent confiné au contre sens chez les pseudo-athées qui constituent la majeure partie ce qu’on appelle les athées. Le supplice de Jésus est une chose très spéciale que seule une fréquentation assidue de la religion permet de remettre à sa place, sachant qu’il n’est nullement un modèle, sur ce coup-là.

    PS fictif : cela fait depuis 2006 que je stagne au niveau 2 et ça va comme ça, ça me suffit. Je vois que les blogueurs insistent sur la progression mais personnellement, je me contente du 2 en lieu et place du 0 même si je tente des mouvements des autres niveaux, toujours plus difficiles qu’ils en ont l’air… Ce que je trouve tristounet et qui était un peu mieux en salle mais je n’y retournerai pas (et d’ailleurs j’étais perplexe dès le premier jour devant l’aspect extravagant et glacé des machines), c’est quand même l’affluence. Je n’échangeais que trois mots mais voir certains mecs à certains niveaux s’échiner à des longues séries avec poids adaptés me motivaient à continuer mes séries modestes. Le regard des autres est assez motivant dans une activité qui reste assez narcissique tout de même, s’agissant d’exprimer sa virilité. De même quand on travaille, si on n’a pas les autres pour voir qu’on travaille vraiment, ce n’est plus drôle. La socialité sur Internet n’est pas la même et je me vois mal noter mes performances pour demander du soutien moral. Ce qui manque à la méthode Lafay c’est l’Autre. Quand je courrais c’était avec un bon copain et c’est toujours lui qui m’entraînait à faire quelques centaines de mètres de plus, ensuite je l’attendais un peu sur un banc. Dans les schémas de la méthode Lafay, le mec est toujours tout seul au milieu de son mobilier et au bout d’un moment, je trouve qu’il a pas l’air fin. La musculation est-elle vouée à demeurer une activité solitaire ? Certes on peut faire la méthode Lafay ensemble avec exos communs et d’autres personnalités mais pour aller plus loin, j’ai pensé à un développement possible avec le concept du main à main, comme au cirque. Cela demanderait un niveau de départ très supérieur au mien a priori mais peut-être qu’en réfléchissant on peut partir d’un niveau pas si élevé. Je suis un dingo mais j’ai toujours assumé 🙂

    1. Je me suis “penché sur le christianisme” 😉
      Il est difficile d’analyser les valeurs sociales dominantes, dans le cadre de l’élaboration d’une méthode de musculation différente, sans rencontrer le christianisme, ses bons et ses mauvais côtés.

  3. Que pensez-vous des ingrédients supposés augmenter le taux de testostérone, Olivier Lafay ? J’ai vu cette publicité qui indique une recette à base de produits non synthétisés chimiquement mais végétaux et animaux ; est-ce inutile, dangereux, placebo ou aussi efficace que ce qui est annoncé ? Je n’envisage pas d’utiliser une chose si étrange vu le degré de crédibilité que j’accorde à une page Internet si bassement accrocheuse mais le principe ne me paraît pas démente a priori, puisqu’il ne s’agit pas d’injection de testostérone qui pourrait provoquer des déséquilibres hormonaux mais à en croire le rédacteur de la publicité augmenter la production de l’hormone phallique par les gonades.

    https://www.testofuel.com/fr/

    Sur le christianisme, la (vraie) pensée chrétienne a toujours une longueur d’avance sur nous, quoi qu’on fasse, du moment que la modernité n’est pas terminée. D’après moi, tout ce qui est mauvais dans la pensée chrétienne est le fruit d’une récupération du christianisme par la logique de l’appropriation et du pouvoir. La psychologie snas parler de la psychanalyse, une des idéologies les plus démentielles qu’on ait osé mettre au point, notamment s’est ingéniée à brouiller les pistes et à récupérer tout ce qui est bon dans la pensée chrétienne tout en l’accusant d’inverser les valeurs alors que c’est la psychologie qui le fait. Si vous trouvez de la négativité dans le christianisme, c’est, je pense, très probablement à travers le prisme déformant de la psychologie qui a influencé les livres mais aussi les pensées et les comportements. On ne peut plus parler trois minutes à 95% des gens sans qu’ils nous sortent un trope postfreudien. (Cela dit, une fois qu’on s’est trouvé soi-même ou qu’on propose une ligne de conduite aussi structurante que celle dans laquelle vous vous inscrivez et que vous continuez/inventez, il paraît peu utile de se plonger dans le christianisme, à moins de vouloir témoigner comme je le fais moi-même.)

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